Manifeste pour le paramédic de demain - Édition Québec

Manifeste pour le paramédic de demain - Édition Québec

Ils ne sont plus disposés à attendre.

Depuis des décennies, les paramédics du Québec sont définis par ce que le système leur permet : des techniciens du transport sous délégation médicale, attachés à une civière, évalués à la minute près, mesurés en délais d’intervention plutôt qu’en résultats.

Mais les paramédics savent — tout comme le public — que l’étendue réelle de leur pratique, de leurs connaissances et de leur valeur dépasse largement ces limites.
Il est temps de redéfinir ce que signifie être paramédic au Québec.

I. Les paramédics sont des cliniciens, pas des livreurs

Ils sont formés pour évaluer, intervenir et prendre des décisions — souvent dans des milieux chaotiques, instables et imprévisibles. Leur travail commence bien avant d’arriver à l’hôpital. Et dans bien des cas, ils sont les seuls professionnels de la santé qu’un patient verra.

Il faut rejeter un système qui réduit leur rôle à de la logistique de transport. Les paramédics doivent être reconnus comme des cliniciens à part entière, avec une pleine autonomie de jugement clinique.

II. Les paramédics forment une profession, pas une simple main-d’œuvre

Le moment est venu de créer un ordre professionnel qui protège à la fois le public et l’intégrité de la pratique paramédicale. Les paramédics du Québec doivent bénéficier de la même autonomie légale et éthique que les autres professionnels de la santé.

La délégation médicale a eu son utilité. Il est temps d’évoluer — vers une pratique autonome, responsable et encadrée.

III. Les paramédics travaillent au-delà de l’ambulance

L’avenir des soins hors hôpital ne se limite pas à la réponse d’urgence.

Il inclura :
- Des soins à domicile
- Du soutien en soins palliatifs
- Des interventions en santé mentale
- La gestion des maladies chroniques
- L’orientation et la navigation dans le réseau

Les décideurs québécois doivent envisager un modèle où les paramédics sont déployés pour ce qu’ils savent faire, pas seulement pour où ils peuvent conduire.

IV. Les paramédics sont les antennes du système de santé

Personne ne passe plus de temps qu’eux dans les foyers, les ruelles, les refuges, les régions éloignées ou les corridors d’urgence.

Ils sont témoins de souffrance, de courage, d’inégalités et de survie. Ils rapportent un savoir de terrain unique, issu des marges du système. Pourtant, leurs voix sont encore trop souvent absentes des lieux de décision.

Les paramédics exigent d’être entendus — comme praticiens, comme conseillers, comme co-concepteurs de la santé publique de demain.

V. Les paramédics sont prêts. Le système, non.

Ils ont les compétences. Ils ont les connaissances. Ils ont la volonté.

Ce qui leur manque, c’est un système qui leur permet d’exercer pleinement leur rôle.

Et pendant que le statu quo persiste, nous gaspillons un investissement collectif immense.

On forme des paramédics pour une carrière de 25 ans ou plus — mais on les pousse à se réinventer ailleurs après moins de cinq. Chaque départ précipité représente non seulement une perte de main-d’œuvre qualifiée, mais aussi un gaspillage de fonds publics, de savoir clinique, et d’expérience humaine. On paie pour les former… puis on les regarde partir.

Nous, le public, devons exiger des décideurs qu’ils cessent de leur demander d’attendre la permission pour prendre les devants.

Il faut plutôt leur permettre de bâtir — avec nous — un avenir où les paramédics ne sont pas que des intervenants d’urgence, mais des professionnels de la santé fiables, respectés et intégrés.

Que cette génération de paramédics du Québec soit la dernière à hériter d’un modèle brisé.

Que la prochaine hérite d’une profession.


Manifesto for the Paramedic of Tomorrow – Québec edition.

They are no longer content to wait.

For decades, Quebec’s paramedics have been defined by what the system permits: transport technicians under delegation, bound to the stretcher, evaluated by the clock, measured by response times rather than outcomes.

But paramedics know — as does the public — that the true scope of their practice, knowledge, and value far exceeds those limits.

The time has come to redefine what it means to be a paramedic in Quebec.

I. Paramedics Are Clinicians, Not Couriers

They are trained to assess, intervene, and decide — often in the most complex, uncontrolled environments imaginable. Their work begins long before they reach a hospital. In many cases, they are the only health professionals a patient will ever see.

It’s time to reject a system that reduces their value to transportation logistics.

Paramedics must be recognized as clinicians with full scope and clinical judgment.

II. Paramedics Are a Profession, Not a Workforce

The time is now for the establishment of a professional order that protects both the public and the integrity of the practice of paramedicine. Quebec paramedics must be granted the same legal and ethical independence as other health professionals.

Medical delegation has served its purpose. It’s time to evolve — toward autonomous, accountable, regulated practice.

III. Paramedics Work Beyond the Ambulance

The future of out-of-hospital care will not be built only on emergency response. It will include:
• Home-based care
• Palliative support
• Mental health crisis intervention
• Chronic disease management
• Referral and system navigation

Quebecois policymakers need to envision a model where paramedics are deployed for what they can do, not just where they can drive.

IV. Paramedics Are the Health System’s Listening Post

No one spends more time in homes, backstreets, shelters, rural outposts, and hospital hallways than paramedics.

They are witnesses to suffering, resilience, injustice, and survival. They bring firsthand intelligence from the margins of the system. Yet their voices are still too often excluded from the table.

Paramedics demand to be heard — as practitioners, as advisors, as co-designers of the next generation of public health response.

V. Paramedics Are Ready. The System Is Not.

They have the skills. They have the knowledge. They have the will.

What they lack is a system that allows them to fully exercise their role.

And as the status quo drags on, we are wasting an immense collective investment.
We train paramedics for a 25-year+ career — but push them to reinvent themselves elsewhere in under five. Every premature departure represents not only a loss of skilled labour, but also a waste of public funds, clinical knowledge, and human experience.

We pay to train them… then watch them walk away.

We, the public, must demand that decision-makers stop asking paramedics to wait for permission to lead.

Instead, let them build — with us — a future where paramedics are not just emergency responders, but reliable, respected, and integrated health professionals.

Let this be the last generation of Quebec paramedics to inherit a broken model.

Let the next one inherit a profession.