Opinion - Je suis paramédic

21-08-2025 - English version follows the French
La profession de paramedic vit une réalité éclatée — et c’est là tout le nœud du problème de la professionnalisation. Trop souvent, on confond l’emploi avec la profession. Mais ce n’est pas la même chose.
Quand ma fille est devenue ingénieure, elle n’a pas seulement obtenu un emploi. Elle a complété des années d’études, répondu à des exigences rigoureuses et, au terme de ce parcours, elle a reçu son anneau de fer — une tradition propre au Canada. Cet anneau, porté à la main dominante, est un rappel constant des obligations éthiques et de la responsabilité professionnelle des ingénieurs. C’est le symbole d’une appartenance à une profession reconnue, régie par des normes et par la confiance du public.
Son emploi dans une firme d’ingénierie découle de cette reconnaissance, mais ce n’est pas la même chose. Elle est ingénieure. Elle travaille dans telle entreprise. La profession et l’emploi s’alignent, mais ils demeurent distincts.
Chez les paramedics, cette ligne n’a jamais été tracée clairement. Les employeurs, les régulateurs et le réseau de la santé brouillent volontairement les cartes. Les paramedics sont maintenus dans l’ombre, nourris de demi-vérités, traités comme interchangeables. Et, avec le temps, plusieurs finissent par le croire. L’identité se réduit au chiffre de camion, au poste assigné, au quart de travail. Quand la question de la professionnalisation revient, le débat dérape trop souvent vers les conditions de travail plutôt que vers la question plus fondamentale de l’identité professionnelle.
Voici la vérité : dire « je suis paramedic » est une affirmation d’appartenance professionnelle. Cela concerne le savoir, les normes de pratique, la confiance du public et la responsabilité éthique. Dire « je travaille comme paramedic » reflète l’emploi, mais ne traduit pas la profondeur de l’identité professionnelle.
Cette distinction est cruciale. La professionnalisation, ce n’est pas une question d’horaires, de temps supplémentaire ou de salaires — ça, ce sont des enjeux de relations de travail, importants certes, mais différents. La professionnalisation, c’est la reconnaissance. C’est la société qui comprend enfin que les paramedics ne sont pas seulement des travailleurs affectés à un quart de travail, mais des professionnels formés et investis d’une responsabilité vitale.
Pour les décideurs qui nous lisent, cette reconnaissance n’a rien de symbolique. Elle implique de bâtir des systèmes qui respectent les standards professionnels plutôt que de seulement combler des trous de couverture. Elle suppose que les décisions politiques s’appuient sur l’expertise des paramedics, plutôt que de leur être imposées.
Pour les paramedics qui nous lisent, cette distinction est encore plus personnelle. La professionnalisation commence par la façon dont on se perçoit soi-même. Si on continue à voir notre valeur uniquement à travers le prisme de l’emploi — les quarts comblés, les camions en service, le temps supplémentaire forcé — on accepte le cadre imposé par d’autres. Mais si on commence par « je suis paramedic » — un professionnel avec des connaissances, un jugement et des responsabilités — alors la conversation change.
Comme les ingénieurs, les infirmières ou les médecins, les paramedics devraient pouvoir dire avec assurance :
Je suis paramedic. Je travaille comme…
L’un définit qui vous êtes. L’autre, où vous êtes employé. L’avenir de notre profession dépend de cette différence.
Et cet avenir ne repose pas seulement sur des titres ou des structures administratives : il repose sur la façon dont nous choisissons de nous définir, individuellement et collectivement. Tant que nous nous verrons comme de simples employés, d’autres continueront à tracer les limites de notre rôle.
Mais dès que nous assumons pleinement notre identité de professionnels, nous changeons les règles du jeu — pour nous-mêmes, pour nos patients, et pour le système dans son ensemble.
Je suis paramédic.
Avec respect.
Hal Newman
I am a paramedic
The paramedic profession exists in a splintered reality — and therein lies the crux of our struggle with professionalization. Too often, we confuse the job with the profession. But they are not the same.
When my daughter became an engineer, she didn’t just land a job. She completed years of study, met rigorous standards, and earned her iron ring — a uniquely Canadian tradition. The ring is a constant reminder of both the ethical obligations and the professional responsibility engineers carry. It symbolizes belonging to a recognized profession, bound by standards and public trust.
Her employment at an engineering firm flows from that recognition, but it is not the same as it. She is an engineer. She works as an engineer at a particular company. The profession and the job align, but they remain distinct.
For paramedics, that line has never been drawn so clearly. Employers, regulators, and the health system itself blur it on purpose. Paramedics are kept in the dark, fed half-truths, and treated as replaceable. Over time, many come to believe it. Identity gets reduced to the shift, the posting, the truck number. And when the subject of professionalization surfaces, the debate too often collapses into workplace grievances rather than the deeper question of professional identity.
Here’s the truth: saying “I am a paramedic” is a declaration of professional belonging. It’s about knowledge, standards of practice, public trust, and ethical responsibility. Saying “I work as a paramedic” reflects employment, but it doesn’t capture the depth of professional identity.
This distinction matters. Professionalization isn’t about scheduling, overtime, or wages — those are labour issues, important in their own right. Professionalization is about recognition. It’s about society understanding that paramedics are not simply workers filling shifts, but trained professionals entrusted with life-and-death responsibilities.
For decision-makers reading this, that recognition is not symbolic. It means designing systems that respect professional standards rather than just plugging holes in coverage. It means ensuring policy decisions are informed by paramedic expertise, not just imposed on it.
For paramedics reading this, the distinction is even more personal.
Professionalization begins with how we see ourselves. If we continue to view our worth only through the lens of employment — shifts covered, trucks staffed, forced overtime — then we accept the frame handed to us by others. But if we start with “I am a paramedic” — a professional with knowledge, judgment, and responsibility — then the conversation changes.
Like engineers, nurses, or physicians, paramedics should be able to say with confidence:
I am a paramedic. I work as…
One is who you are. The other is where you happen to be employed. The future of our profession depends on knowing the difference.
And that future rests not only on titles or administrative structures, but on how we choose to define ourselves — individually and collectively. As long as we see ourselves as “just employees,” others will continue to draw the boundaries of our role.
But the moment we fully claim our identity as professionals, we begin to change the rules of the game — for ourselves, for our patients, and for the system as a whole.
I am a paramedic.
With respect.
Hal Newman