Témoignage : Se battre pour faire reconnaître un TSPT

Ce témoignage fait partie de notre série en cours sur ce qui se passe quand celles et ceux qui soignent traversent à leur tour une crise de santé mentale — et cherchent de l’aide.
À travers ces récits à la première personne, La Dernière Ambulance souhaite garder les voix du terrain au centre de la lecture essentielle sur la santé psychologique au travail.
Aujourd’hui, une intervenante raconte son parcours avec la CNESST, après avoir été poignardée par un patient et s’être battue pour faire reconnaître son TSPT.
➡️ Son histoire, publiée avec son consentement et dans le respect de son anonymat :
Moi, c’est vraiment la CNESST qui a contesté ma demande et non mon employeur. Non, pas du tout — moi c’est une histoire d’horreur avec des bévues policières et du DPCP. Je me suis battue contre tout le monde.
En fait, j’étais agent d’intervention psychiatrique à l’Institut de santé mentale de Montréal. En avril 2021, je me suis fait poignarder dans le cou par un patient avec un stylo, à l’urgence. Je suis revenue travailler trois jours plus tard.
En septembre 2021, j’ai changé d’emploi, mais auprès du même CIUSSS. En octobre 2022, j’ai eu un dossier (je travaille maintenant comme intervenant social dans les familles en crise) où une jeune a tenté de poignarder sa mère. Bref, fil en aiguille, ma tête a commencé à réfléchir bizarre, mes réactions aussi, etc. J’ai consulté en mars 2023 et on m’a diagnostiqué un TSPT.
Initialement, j’ai continué à travailler, mais j’ai commencé à chercher une psychothérapeute. Rapidement, la CNESST a refusé mon dossier.
Ils me disaient que j’avais six mois pour déclarer mon PTSD, que ça faisait plus de deux ans, etc. J’ai donc contesté et écrit un courriel au ministre délégué de la Santé, Lionel Carmant. Son directeur de cabinet m’a avisé qu’il ne s’impliquait pas dans ce genre de dossier, mais m’a fourni la charte des évaluations de la CNESST en lien avec les post-trauma.
Dans cette charte, c’est indiqué clairement que le client a six mois suivant le diagnostic émis par le médecin. Moi, je l’avais immédiatement déclaré.
En juillet ou août — je ne me rappelle plus — la réviseure m’a contactée et m’a effectivement donné raison. Mon employeur également était en accord avec mon diagnostic et ils avaient aussi discuté avec la réviseure.
Ensuite, d’autres combats ont eu lieu. J’ai dû me battre pour faire payer mon kilométrage : la CNESST me disait que je pouvais y aller en autobus (je suis à Saint-Hubert et ma psychothérapeute est à Châteauguay — soit deux heures et demie aller, deux heures et demie retour de bus). Les autres combats ont été judiciaires, mais mon dossier s’est terminé en arrêt Jordan.
Je suis encore en arrêt complet depuis septembre 2024. En fait, les post-trauma sont « une classe à part », selon ce qu’on m’a dit. Donc les agents qui traitent les demandes ne sont pas habitués et se fient au « six mois pour déclarer ». Ils ne tiennent pas compte du fait que les TSPT surviennent souvent plus tard.
Mais bon, ma lésion est reconnue — même si j’ai dû me battre.
Aussi, ce qui a aidé pour moi, c’est que ma tête fonctionnait encore super bien à ce moment-là. Ce fut facile de me battre. Mais mettons qu’aujourd’hui, je n’ai plus les mêmes capacités cognitives, puisque j’ai été au plus bas récemment. Donc je commence à récupérer.
Dans mon cas, mon employeur a supporté mon dossier et offert une alternative pendant la contestation de la CNESST.
Signé,
O.